LaRose - Louise Erdrich

On retrouve la belle écriture prenante, profonde de Louise Erdrich et cet univers amérindien où les personnages ont « le sentiment d’être les vestiges en lambeaux d’un peuple à l’histoire compliquée » qu’elle sait si bien exprimer.
À raconter comme ça, le début du roman risque de vous paraître too much - mais c’est si finement écrit que ça marche, que c’est très fort:
Landreaux, visant un cerf, tue le fils de son ami Peter Ravich. Folle sagesse, stupéfiante, démentielle compensation, il offre à Peter son fils, LaRose.
« Il arrive que ce genre d’énergie - le chaos, la malchance - s’échappe dans le monde et ne cesse d’enfanter et d’enfanter encore. La poisse s’arrête rarement après un seul événement. Tous les Indiens le savent. Y mettre fin rapidement exige de grands efforts, ce pourquoi LaRose avait été envoyé. »
Et LaRose n’est pas n’importe qui. J’ai adoré ce personnage merveilleux, d’une tendresse, d’une humanité, d’une sagesse magnifique. LaRose porte le nom des guérisseurs de la famille, il sait combattre les démons, dissiper les humeurs peau de vache, libérer chez ceux qui l’entourent la lumière enfouie sous des tonnes de ténèbres.
Un peu comme Louise Erdrich, qui fait surgir une profonde beauté de tous ses personnages, même les plus sordides, qui les rend très touchants, très attachants. La dureté est transcendée par une grâce, une belle humanité, la magie d’une écriture qui sait créer quelque chose de rayonnant tout en exprimant des réalités rudes et âpres.
La façon dont se mêlent le récit principal, des histoires appartenant au passé, une dimension un peu surnaturelle donne au roman une belle épaisseur narrative et cette force, ce charme, du réalisme magique. Les frontières entre réalité quotidienne et imaginaire s’estompent , « le tissu entre les réalités, les vivants et les morts,» devient poreux et cette porosité réenchante la vie humaine. Envoûtant!